Au fil des années, la cidrerie Mignard continue de se développer et de se diversifier, mais Joker souhaite investir en Espagne dans le secteur du jus d’orange. En 1991, l’actionnaire décide donc de vendre Mignard à l’un de ses concurrents sur le marché des jus de fruits : Pernod Ricard.
La reprise par Pernod Ricard
Pernod Ricard souhaite poursuivre sa diversification dans les jus de fruits et les cidres et vise les « Cidreries Mignard » ainsi que la cidrerie « Duché de Longueville ». Mais Serge n’a pas été informé des transactions menées par Joker. Il avait une alternative avec une cidrerie belge mais c’est déjà trop tard.
Lorsque Pernod Ricard a repris Mignard, on était en droit de s’inquiéter car cette société possédait de nombreuses cidreries, aussi bien en Normandie qu’en Bretagne. De plus, la Seine et Marne n’était pas considérée (à tort évidemment) comme une région cidricole, malgré son passé et les nombreuses plantations de nouveaux vergers. – SM
Pernod Ricard rachète donc Mignard à Joker, en même temps que la cidrerie du Duché de Longueville, possédant ainsi plus de 50% de part de marché du cidre.
Voir rapport annuel Pernod Ricard 1991
Malgré ce qui ressemble à un abus de position dominante, on peut s’étonner du fait que la vente soit entérinée par le conseil de la concurrence.
Voir avis n°92-A-08 du 20 octobre 1992
Dans un premier temps, rien n’a changé chez Mignard. Le personnel est conservé et Serge devient le PDG de la cidrerie, ce qu’il n’avait jamais été à l’époque d’Ariel ou de Joker. De plus, il est rassuré sur les capacités financières du groupe.
Cidre Jehan de Brie et export
Pour assurer la pérennité du site de Bellot, Serge maintient l’effort sur l’exportation et tente d’apporter une valeur ajoutée supplémentaire avec le lancement d’un cidre de spécialité : le cidre « Jehan de Brie ». Ces initiatives permettent de conserver à Bellot pendant deux ans environ 50% de l’effectif global.
L’un de nos fournisseurs de pommes avec lequel nous avions des contrats de plantation, Michel Biberon, a sollicité Pernod Ricard pour reprendre la marque, ce que j’ai bien sûr encouragé.
Aujourd’hui, Jehan de Brie existe toujours, et s’est même développé en même temps que la petite cidrerie de la ferme de la Bonnerie à Verdelot. – SM
La restructuration par Pernod Ricard
En 1993, la cidrerie Mignard est intégrée au dispositif « Cidres et Jus de Fruits » de Pernod Ricard, via sa société CSR Pampryl.
Voir rapport annuel Pernod Ricard 1993
Malheureusement, la restructuration se poursuit et une partie de la production est transférée dans d’autres usines, essentiellement au Theil sur Huisne dans la Sarthe. Une partie du personnel de la cidrerie de Bellot va travailler dans d’autres lieux du groupe (à la Courneuve pour l’administratif, à Nuits saint Georges chez Pampryl ou à Mitry Mory). Il ne reste plus à Bellot que 30 à 40% de l’activité (le cidre Jehan de Brie, l’export et le jus de raisin Challand). Le matériel commence à être démonté (les cuves en acier inoxydable, les chaînes d’embouteillage…) pour être réinstallé sur d’autres sites de production.
En 1995, coup de tonnerre : Pernod Ricard opère une restructuration industrielle sur le secteur du cidre tout en conservant sa part de marché et en s’appuyant sur les marques « Raison », « La Cidraie » et « Duché de Longueville ». Le succès de Jehan de Brie et les bons résultats à l’exportation n’empêchent pas la fermeture définitive du site de Bellot qui n’était plus stratégique pour Pernod Ricard.
La cessation d’activité
La cidrerie de Bellot doit cesser complétement son activité. Un coup dur pour le personnel pour qui l’on recherche des solutions : des emplois dans d’autres établissement du groupe pour celles et ceux qui acceptent la mobilité, des retraites anticipées, un accompagnement selon les compétences. Fort heureusement, le plan social a permis de limiter au maximum les cas douloureux.
Pour éviter la fermeture complète de Bellot, j’ai tenté sans succès de faire intervenir les politiques que je connaissais bien en tant que maire : Jacques Larché (sénateur et président du conseil général de Seine et Marne et sénateur), Alain Peyreffite (notre député) et même Charles Pasqua (ancien collaborateur de Paul Ricard). De son côté, Pernod Ricard a mené un plan social à la hauteur de ses moyens, avec des emplois proposés dans des usines du Groupe et au siège de CSR Pampryl à la Courneuve, ainsi que des retraites anticipées. Pour les personnes souhaitant rester dans la région de Bellot, il apporta son concours. Dans cette tourmente, j’ai eu la satisfaction de remarquer à quel point le personnel de la cidrerie était remarquable, aux dires mêmes de nos nouveaux employeurs. En ce qui me concerne, je suis allé travailler au siège de CSR Pampryl à La Courneuve comme secrétaire général puis en tant que directeur industriel. J’y ai retrouvé Marc Buisson (directeur technique), Dominique Seynave (transports), Pierre Truchon (directeur export), Bernard Kimmerlin et Laurent Aubry (export), Jean-Michel Gallot (commerciaux), Arlette Béharel (secrétaire de direction), Rose Brodard et Geneviève Picot (service informatique), pour ne citer qu’eux. – SM