Adolphe a progressivement remplacé les foudres en bois (chacune quelques dizaines d’hectolitres) par des cuves en ciment. L’intérieur était revêtu de carreaux de verre d’environ 25 cm de côté, jointés par un enduit bitumineux alimentaire afin de protéger le ciment qui se serait dégradé à cause de l’acidité du cidre. A noter que ce n’était pas le cas pour la bière ou le vin (dont le Ph est plus élevé) qui au contraire déposent une fine couche de tartre protégeant ainsi la paroi : Bierstein et Weinstein. On peut encore voir dans « l’ancienne cidrerie » les premières cuves construites par Adolphe, d’une contenance de 100 à 200 hl (soit 10.000 à 20.000 litres), numérotées 1-2-3 …
Ariel a poursuivi la construction de cuves en ciment verrées en faisant appliquer sur les nouvelles un enduit alimentaire noir du type « flinkote ». Mais cette technique n’était pas idéale. D’une part, les cuves sont couteuses et nécessitent une main-d’œuvre qualifiée. D’autre part, chaque année avant l’automne, il fallait vérifier, refaire les joints des cuves verrées et repeindre tout ou partie des cuves dont le ciment était devenu apparent. Le travail était particulièrement pénible pour les ouvriers qui devaient se faufiler par un « trou d’homme » rectangulaire ou elliptique pour y passer la journée ! Pour y remédier, Ariel complète le dispositif par des cuves en acier dont la paroi intérieure était protégée par une peinture alimentaire. Quatre cuves cylindriques de très grande contenance (2.500 hl) ont été construites, toujours par des maçons italiens (comme pour la cidrerie).
Fin des années 50, Ariel souhaite développer le jus de pommes qui nécessite une importante manutention et un énorme volume de stockage en bouteilles au moment de la fabrication. Il fait donc construire une cuverie froide permettant de maintenir la température du jus proche de 0 °C. Pourvues d’une isolation en panneaux liège de 16 cm d’épaisseur, elles sont réfrigérées par un liquide glycolé (antigel comme pour les radiateurs de voiture) qui circule à l’intérieur de tubes noyés dans les parois de ciment. Les premières années, le jus de pommes pouvait se conserver plusieurs semaines voire 2 mois. Hélas les levures se sont habituées aux basses températures et devenues des « cryo-levures ». Plus tard, ces cuves ont été utilisées par Serge pour le coupage des cidres avant l’embouteillage, la réception du jus de raisin livré en citernes isothermes et même la préparation des boissons gazeuses (limonade et sodas).
A partir de 1965, Serge dirige la cidrerie et souhaite pouvoir conserver du jus de pommes toute l’année. Dans un premier temps, il installe des cuves en aluminium et met au point un système de bondes aseptiques pour que le produit « flash pasteurisé», en circulant dans un appareil à plaques (échange thermique avec de la vapeur), puisse pénétrer dans une cuve stérile exempte de tout germe susceptible de provoquer un départ en fermentation, ce qui était contrôlé chaque jour. Des cuves en acier inoxydable (dont le coût était devenu compétitif avec l’aluminium) ont été ajoutées notamment dans une nouvelle cuverie réfrigérée qui en contenait huit de 850hl chacune.
Avec l’augmentation constante des ventes, et malgré la cuverie de la cidrerie de Rouen puis celle d’Auffay, la cuverie de Bellot s’est avérée toujours trop restreinte : il a donc été nécessaire de stocker du cidre dans le port de Rouen ou la halle aux vins de Bercy. C’est pourquoi quatre nouvelles cuves en acier de 2.500 hl ont été installées à Bellot.
La capacité totale de stockage de la cidrerie était donc de 130 000 hl, soit 13 millions de litres ! Il n’en fallait pas moins pour pouvoir aux besoins de l’année et prévoir un stock tampon pour les années de faible récolte.
Commentaire de Serge Mignard.